Un « Stolpersteine » en mémoire de Félix Peupion

Paru dans le R.L. du 04/03/2021

jeudi 4 mars 2021

Un Stolpersteine, petit pavé en laiton, sera placé prochainement par la municipalité sur le trottoir, à Montigny-lès-Metz. Il rappellera où habitait Félix Peupion, comme c’est le cas dans de nombreux pays pour les victimes du régime nazi, persécutées, déportées ou assassinées entre 1933 et 1945

Félix Peupion était un homme politique et un valeureux combattant des deux conflits mondiaux, un résistant disparu dans l’horreur de Dachau.

Félix Peupion est né le 19 avril 1882 à Charleville, dans les Ardennes. Il était conseiller municipal de Montigny depuis 1925. Élu maire en 1927, il fut réélu en 1929 puis en 1935. Il transforma la ville grâce à une urbanisation débutée sous la Première annexion (18 000 habitants en 1934, garnison comprise). Il sut faire face à cette évolution en créant un Office d’habitation à bon marché et fit construire plusieurs lotissements. On lui doit un groupe scolaire destiné à recevoir 600 élèves inauguré le 12 juillet 1936. La débâcle de 1940 met fin à son engagement civique.

En zone libre

Dans les Vosges, avec la IIIe armée, il est fait prisonnier, s’évade, se terre dans la forêt, réussit à gagner Paris et la zone libre en octobre 1940, à Clermont-Ferrand, avec sa famille, et reprend du service au 4e bureau de la 13e Région militaire.

Il reçoit les prisonniers libérés ou évadés, s’occupe de leur reclassement. Il organise un réseau affilié à l’ORA, que dirige le général Frère, prend en charge ceux qui souhaitent rejoindre la France libre, s’occupe de trouver des caches pour les armes parachutées. La Gestapo veille. Le 7 avril 1944, jour du Vendredi saint, Félix Peupion y est convoqué. Le 15 avril 1944, il est arrêté. Commence alors un calvaire de dix mois

Transféré au camp de Dachau

À la prison militaire du 92e RI de Clermont-Ferrand, il est enfermé, transféré à Compiègne dans la chambrée 13 du bâtiment 6.

Le 2 juillet 1944, le convoi 7 909 quitte la gare. 2 166 déportés sont enfermés par groupes de 100. Un voyage hallucinant de quatre jours. L’asphyxie et la soif y provoquent d’indescriptibles scènes de folie. Le deuxième jour, il n’y a que 24 survivants. Le 5 juillet, quand le convoi arrive au camp de Dachau, on sort du train 536 cadavres.

Matricule 77 271

Jean Schneider, arrivé au camp le 4 septembre 1944, après avoir été détenu au Struthof, raconte que Félix Peupion, matricule 77 271, semble résister aux épreuves physiques et garde un excellent moral. Pourtant, il entre à l’infirmerie au plus fort de l’hiver avec une pneumonie grave, contractée dans les blocks non chauffés, par une température de -20°C. Maladie fréquente pour des prisonniers vêtus de haillons, chemises déchirées, pantalons en loques, sans tricot ni chaussettes, et qui n’avaient pour toute nourriture qu’un quignon de pain noir et lourd, et une soupe maigre et claire par jour. Pourtant, il allait vers sa guérison. À peine tiré du danger, il fut rendu au camp. « Ce sera ma mort », dit-il. Au block, au bout de quelques jours, il contracte une dysenterie. Félix Peupion meurt dans la nuit du 10 février 1945.

Dans l’armée française

Sa carrière dans l’armée française avait commencé avant 1914. Il se trouvait en Lorraine annexée quand l’état de danger de guerre fut proclamé. Il passe la frontière pour rejoindre les rangs de l’armée. En août, il a le grade de sous-lieutenant. Il est décoré de la croix de guerre avec trois étoiles et palme, après avoir planté le drapeau du 409e RI sur la butte de Souain, au nord de Reims, lors de l’offensive de septembre 1918. Le capitaine Peupion fut fait chevalier de la Légion d’honneur. Commandant de réserve en 1939, il est affecté à la mobilisation de septembre, au 2e bureau de l’État-Major de la IIIe armée installé au fort Jeanne-d’Arc (Rozérieulles). C’est lui qui, dans la nuit du 10 mai 1940, accueillit, à la frontière, la Grande-Duchesse du Luxembourg et sa famille qui fuyaient devant l’envahisseur.

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